ALLEMAGNE

République fédérale d'Allemagne
Capitale : Berlin
Superficie : 356 755 km2
Population : 79 000 000 h.

Analyse et proposition ethniste 1993

La grande révolution HISTORIQUE de ces dernières années, c'est la réunification allemande.
Loin d'être complète sur le plan ethnique, elle est également fallacieuse puisqu'elle devrait à nouveau se disloquer non dans le sens Est/Ouest qui fut celui de l'expansion de ses vainqueurs de 1945, mais dans le sens Nord/Sud qui est celui de sa dualité ethnolinguistique pluriséculaire.
Un aménagement de son excellente structure fédérale devrait permettre de faire coïncider les réalités humaines fondamentales avec les limites territoriales, politiques et administratives. Le découpage des Ländes mixtes, la création d'un land de Lusace et d'un de Schleswig (dano-frison) parfairait la réalité démocratique actuelle.
Berlin pourrait être alors une véritable capitale fédérale, continuant de partager avec Bonn les instances de pouvoirs.
L'activation des deux tendances culturelles et humaines Nord/Sud associe probablement des effets positifs bien supérieurs en termes de géopolitique, à ceux de la seule réunification. Ces deux Allemagnes, au fil de leurs attirances naturelles, auraient d'autres arguments à faire valoir sur le plan territorial, que ceux qu'une seule et unique nation peut mettre en avant aujourd'hui.
Mais aucune force politique ou intra-politique, sociétale, n'existe à l'heure actuelle qui soit en mesure de pousser à la séparation ; celle-ci serait peu dramatique étant donnée la situation d'intégration économique et politique existant avec les voisins occidentaux. Mais elle serait révolutionnaire aux plans culturel et géopolitique.

Si l'équation : une ethnie = une nation = un état représente pour les ethnistes l'ordre idéal, il n'est pas absolument toujours possible ni nécessaire de parvenir à un tel absolu. Bien des ethnies sont constituées en états "régionaux", sans pour cela nuire à leur vitalité générale (Anglo-Saxons, Allemands, Arabes...). Les dissensions qui peuvent exister entre ces états, notamment arabes, ne seraient pas forcément éliminées si une unification générale intervenait, l'exemple serbo-croate ne va pas dans ce sens, bien au contraire.

Jean Louis Veyrac 1993
(analyse de François Fontan bien antérieure et dont l'actualité récente n'a pas démenti les fondements)


La nation allemande

La nation allemande en tant qu'ethnie - pas en tant qu'état - a été formée à peu près à la même époque que la nation française. Mais la différence c'est qu'elle n'a pas réussi à former son unité politique jusqu'à une époque récente : elle a fait de grands progrès vers 1938 sur ce plan là, puis l'unité allemande a de nouveau fortement régressé. (Signalons en passant la position de Marx et Engels pour l'unité allemande à partir de l'Autriche...)
Il y a eu la formation de langue unifiée allemande au 16ème siècle par une élaboration très consciente de la chancellerie de Saxe et de la chancellerie d'Autriche, langue nationale qui a été popularisée par Luther, et qui s'est imposée.

C'est au 19ème siècle, nous l'avons dit tout à l'heure, que le nationalisme allemand s'est développé, avec un contenu social totalement progressiste à l'époque, ne faisant qu'un avec le développement de la bourgeoisie nationale contre la féodalité. Il y a eu en 1919, avec l'effondrement des deux empires, une tentative de fusion de l'Autriche avec le reste de l'Allemagne qui a été interdite par les puissances victorieuses : le parti social-démocrate autrichien s'était prononcé pour le rattachement à l'Allemagne, et la droite, le parti clérical, était acharnément contre.

Et puis il y a eu l'hitlérisme : c'est-à-dire une utilisation du nationalisme au profit de certaines structures sociales et politiques, avec en plus des motivations psycho-sexuelles très fortes (qui représente un cas extrême en ce domaine). Hitler a écrit textuellement que le nationalisme n'était pour lui qu'un moyen pour réaliser une structure sociale strictement hiérarchisée. Le petit aspect positif a été uniquement de rechercher dans une première étape le rattachement à l'état allemand de fractions de la nation allemande qui en étaient séparées : Autriche, Alsace-Moselle, Sudètes, Luxembourg. Mais Hitler ne s'est pas attaqué à la Suisse, et il a abandonné les Allemands du Sud-Tyrol à Mussolini : ce qui prouve qu'il se foutait éperdument de la nation allemande, d'autant plus qu'au milieu de la guerre la nouvelle étape de ses objectifs s'est clairement exprimée, l'européanisme...

Et depuis 45, le problème de la nation allemande est au cœur de la situation de toute l'Europe, des rapports entre les deux "blocs" : la nation allemande a vu ses anciennes divisions réapparaître, avec une séparation supplémentaire en deux états, chacun contrôlé par un "bloc"...

Il faudrait peut-être préciser aussi que tout le nord de l'Allemagne n'est pas allemand (avec Kœnigsberg, Berlin, Hambourg, etc.), mais néerlandais. Il y a dans l'état allemand le même problème que dans l'état français : un nord et un sud de nationalités distinctes. Les Allemands du nord (plattdeutsch ou niederdeutsch) sont des Néerlandais dans une situation tout à fait comparable à celle des Occitans. Seulement par un phénomène bizarre l'unité allemande s'est faite à partir de la Prusse, par l'expansion constante de l'état prussien à partir de 1500 et qui a abouti à l'état allemand avec Bismarck. L'état prussien avait été constitué par une poignée de colons allemands, les chevaliers teutoniques, installés sur une nation balte qui fut exterminée, les Vieux-Prussiens (un des trois cas connus de nations disparues en Europe depuis l'an 1000, les deux autres étant les Goths de Crimée et les Dalmates). Ces néo-prussiens repeuplèrent les territoires (de Prusse orientale) avec des Néerlandais dans le nord et des Polonais dans le sud (en Mazurie). C'est à partir d'une colonie qu'a été fait un état national allemand...

Actuellement, au cœur de tous les problèmes mondiaux, il y a celui de la réunification et de l'indépendance de l'Allemagne contre les deux impérialismes qui la dominent et la maintiennent divisée (même les trois puisqu'à l'est de la ligne Oder-Neisse les Polonais occupent la Basse-Silésie, etc.). On peut dire que 20 ans ont été perdus avec la mort du leader social-démocrate Schumacher, ressorti par miracle des camps de concentration nazis (avec un œil, un bras, une jambe en moins). Animé d'une grande énergie, il a reconstruit dès la libération un parti social-démocrate allemand en le voulant, lui martyr de l'hitlérisme, violemment nationaliste allemand, neutraliste, et anti-américain. Après sa mort, au bout de deux ou trois ans, le parti social-démocrate est devenu identique au parti chrétien-démocrate : totalement pro-américain. Un fait essentiel, c'est que l'économie allemande de l'ouest est infiniment plus absorbée par les trusts américains que l'économie française. Avec W. Brandt, il est possible qu'on assiste à un début de renouveau d'une voie nationale allemande, plus neutraliste par rapport aux Américains, mais ce n'est vraiment qu'un début dont il faut voir ce que cela va devenir.

Pour ce qui est de l'Allemagne de l'est, cela a été longtemps l'état fantoche type. La colonisation par les Russes a été totale, et toute velléité communiste nationale sans aucune possibilité de s'exprimer. Ce n'est que depuis deux ou trois ans qu'il semble y avoir un commencement d'évolution, coïncidant avec un certain essor économique, ce qu'il faudrait examiner de plus près.

Dans la mesure où les frontières des Allemagne sont des frontières de "blocs" toute possibilité de changement présuppose la détente. Et c'est en ce sens qu'on peut accepter seulement de façon tactique la reconnaissance de la Ligne Oder-Neisse (politique de Brandt). Cette nécessité de détente préalable a été très bien exprimée par le leader des socialistes sudètes, Jacht (lui aussi résistant anti-nazi ayant passé des années dans les camps nazis, et devenu ensuite, en Allemagne de l'ouest, jusqu'à sa mort, le leader du mouvement sudète pour la récupération des terres) : pour lui, la récupération de leurs terres par les Sudètes, le retour dans leur patrie, ne pouvait se réaliser que par la paix et la coopération avec les pays de l'est, par une voie pacifique.

Pour ce qui est des Sudètes, il en reste 300 000 en Tchécoslovaquie, dans le territoire des Sudètes, les autres ont été expulsés et sont actuellement en Allemagne de l'ouest ou en Allemagne de l'est. Il est bien curieux de constater que le parti du prolétariat en Tchécoslovaquie a déporté en 1945 la majorité des prolétaires qu'il y avait dans l'état tchécoslovaque parce qu'ils étaient d'ethnie allemande. Et mieux, en 47-48 ont été édictées des lois raciales en particulier contre les citoyens d'origine allemande. (Il y a eu, à l'époque du printemps de Prague, l'abrogation de ces lois raciales, ce qui a permis aux Russes de dire à un moment que le printemps de Prague était un mouvement organisé par les Allemands pour reprendre les Sudètes...). Encore une précision sur les Sudètes : cette zone inhabitée de forêts montagneuses entre le peuplement de la plaine de Bohême-Moravie et le peuplement allemand a été peuplée vers 1300-1400 par les Allemands qui l'ont défrichée et y ont ouvert des mines ; la frontière linguistique entre Allemands et Tchécoslovaques n'a que très peu variée, on ne peut donc absolument pas parler d'invasion allemande sur ces territoires des Sudètes...

François Fontan 1971

carte

tableau des populations, ethnies, langues, religions

-> retour a la liste