LETTRE F

EFFORT NATIONAL FRANCE (1980)
Question : Dans le monde d'aujourd'hui, où sévit une guerre économique implacable, les nations modernes ont besoin d'un haut niveau de recherche scientifique qui implique un effort financier considérable. Croyez-vous que la France puisse se permettre de morceler cet effort national ? La recherche scientifique étant très coûteuse, il est impossible de la concevoir dans le cadre d'un budget breton, corse, ou dans celui d'une France amputée?
Réponse : Mon analyse est différente; d'abord il n'est pas prouvé que toutes les ethnies doivent obligatoirement, pour leur bien-être, se situer dans le peloton de tête des pays faisant de la recherche scientifique tous azimuts. La Suède et le Danemark n'en éprouvent pas la nécessité et pourtant, que je sache, ces pays ne souffrent pas d'une détérioration de leur identité. D'autre part, la France et d'autres pays centralisateurs à vocation scientifique sont justement en train de faire les frais d'une politique centralisatrice qui a considérablement retardé la recherche par rapport à des nations dont la politique est décentralisatrice. La recherche scientifique doit pouvoir utiliser toutes les forces vives du pays; or, la situation en Occitanie, Bretagne et Corse est celle de régions dont les populations sont hostiles sinon indifférentes à tout ce qui concerne cette recherche.
Ces populations semblent signifier au pouvoir centralisateur que cette compétition ne les implique pas, toute initiative dans ces domaines leur échappant. L'exemple de Sophia-Antipolis (centre de recherche et d'industrie sur la Côte d'Azur) illustre bien les fausses décentralisations, puisqu'il ne s'agit que de déplacer des chercheurs français du nord au sud et de les installer dans une "ville" créée ex-nihilo : la visite de ce centre évoque une ville coloniale en territoire indigène.

FINKELKRAUT
Reconnaît la réalité des particularismes et les combat. je suis donc en désacord avec lui.

FRANCE DEBAT
Il serait bon qu'un débat soit tenu autour de la question: Qu'est-ce-que la France ? Ce ne serait ni un débat anti-français, ni un débat sur la grandeur de la France, mais un débat où toutes les argumentations et contre argumentations, tous les points de vue, toutes les définitions et hypothèses sur ce qu'est la France et le peuple français pourraient être développés.

FRANCE ET ALLEMAGNE (1989)
La France, militairement et grâce à l'arme nucléaire, est plus forte que l'Allemagne, ce qui veut dire qu'en cas de bras de fer et de conflit majeur, la France pourrait vouloir dicter sa volonté à l'Allemagne. Par contre, en situation de paix et d'un marché économique libre, par le simple fait de son poids économique l'Allemagne conquiert et achète peu à peu la France. On pourrait presque imaginer l'Allemagne disant à la France qui lui parle du droit du vainqueur : "cause toujours mon petit, pendant ce temps j'achète une à une tes entreprises".

FRANCOPHONIE ET LANGAGE SCIENTIFIQUE :
La France grogne contre l'anglicisation de l'institut Pasteur. J'ai envie de leur répondre : c'est naturel non ? Il faut laisser la nature se faire. C'est ce que vous avez dit par rapport à leur langue aux Basques et aux Bretons en ajoutant qu'il n'y avait pas assez de termes scientifiques pour pouvoir écrire dans ces langues.
Juste retour des choses.

IDENTITE FRANCAISE (Discours de Chirac Juin 91)
La défense de l'identité française est aussi légitime et juste que celle de n'importe quelle autre identité : Kurde, Basque, Bretonne.
Ceci étant, l'impérialisme français n'est pas légitime et défendre le droit de passer 24 heures sur 24 de chansons françaises aux Esquimaux ne serait pas une défense de l'identité française mais une acculturation des Esquimaux.

LE FOULARD (1989)
Le foulard islamique : d'une part je suis pour car je suis contre l'intégration
pour le droit à la différence et pour la liberté d'expression de sa différénce.
Interdire le foulard  théoriquement pour cause de laïcité,
c'est continuer à interdire de parler le breton, le basque et le corse,
et c'est interdire le béret basque et  la casquette occitane
ou la culotte alsacienne.
Je ne vois aucun mal à ce que les élèves  aillent à l'école en y apportant leur identité
et se respectent des uns les autres. Apprendre les maths ne veut pas dire ne pas avoir d'identité.
Une laïcité qui se voudraient uniformité serait de l'impérialisme culturel. C'est le " j'ai raison et vous avez tort " des athés .
Cependant, d'autre part je suis contre dans la mesure où les occitans veulent être chez eux et si la présence du foulard leur donne l'impression de ne plus y être. Alors ils ont le droit de dire non et de toutes façons c'est une décision qui doit être prise sur le terrain par référendum local.

LES ETHNIES EN FRANCE(1982)
Question : Pensez-vous que l'attitude du pouvoir politique en France vis-à-vis des minorités culturelles ait changé depuis quinze ans ?
Réponse : Le pouvoir de Mitterrand désire donner une image de pluriculturalité libérale. C'est loin d'être le cas. La télévision française est toujours un instrument aux mains du pouvoir culturel français avec pour objectif la destruction sur le territoire des cultures minoritaires. Il y a, en fait, derrière la direction des trois chaînes, une farouche politique d'acculturation envers les cultures minoritaires. C'est le cas, par exemple, des émissions historiques où, quand il s'agit des minorités, la langue n'est pas restituée, ni même l'accent rendu. Depuis 1981, la situation n'a pas évolué, c'est la même chose, avec un peu plus d'hypocrisie.

MINORITES EN FRANCE (1979)
Question : Pouvez-vous nous donner des exemples précis de cette oppression culturelle de langue française sur les minorités?
Réponse : Les exemples ne manquent pas. Commençons par les plus flagrants. L'Etat, a transformé la radio et la télévision en structures de guerre culturelle : de véritables rouleaux compresseurs pour imposer la culture française et éliminer les langues minoritaires. En fait, les médias perpétuent l'objectif de Jules Ferry : imposer partout et tout le temps la langue française. Chaque émission de radio et de télévision est filtrée, refiltrée ethniquement. Sur aucune des chaînes, on ne reconnaît l'existence de cultures minoritaires, aucune chance au prorata réel de leur indice d'écoute ne leur est offerte.
Quant à la réalité de leur possibilité d'écoute, le brouillage et la destruction par exemple de Radio-Corse internationale sont probants. Sinon, comment expliquer cette attitude du pouvoir central ?
Second exemple : dans l'enseignement, les soi-disant possibilités de choisir l'occitan, le basque ou le corse sont inexistantes, ou alors mensongères, illusoires et irréalisables. Dans le formulaire que j'ai reçu pour ma fille qui est au lycée, il était indiqué "option niçois ou occitan", mais en réalité, on nous a répondu : "nous n'avons pas de professeur"; il arrive aussi que la programmation de ces cours soit telle qu'elle empiète sur les loisirs des jeunes gens. La stratégie consiste à faire croire que l'on tient compte des langues minoritaires tout en décourageant à jamais ceux qui auraient le désir de les apprendre.
Troisième exemple, celui des écoles des Beaux-Arts : l'enseignement de la culture générale y est assurée par des professeurs qui passent leur concours à Paris et prennent le train chaque semaine pour passer deux jours dans la ville de leur affectation; presque tous vivent donc dans l'ignorance complète du patrimoine culturel du lieu où ils enseignent. Dans les nombreuses écoles d'Occitanie, y a-t-il seulement un professeur de culture générale qui sache qu'il existe une culture occitane ?

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